- Ntumba Matunga
- décembre 10, 2020
- 8:00 pm
Le confinement, en plus de nous isoler, a causé chez certaines d’entre nous une hausse d’anxiété qui avant paraissait minime. Le fait de rester chez soi nous incite à ruminer et trouble notre paix intérieure dérangée par des idées destructrices. Des idées qui nous dévalorisent, nous donnent un sentiment de stagnation, et renforcent tous nos complexes. C’est ainsi qu’arrivent les nuits où le sommeil se veut fuyant sans se soucier de savoir quelles seront nos activités nocturnes pendant son absence. Une absence qui humidifiera nos oreillers, chaque nuit un peu plus.
Souffrir de l’anxiété du confinement, se retrouver noyée par les crises de larmes liées à l’arrivée de ses règles mais en plus de cela devoir faire face à la dépression saisonnière? Un supplice insupportable dont on est pas toujours certaine de voir la fin ! Souvent je m’entends dire « Un peu de courage sois une femme… Noire ! Résiliente, serre ton cœur comme on nous a appris à le faire, ne te laisse pas abattre. » et la minute d’après je me sens horrifiée, surprise par mes propres pensées. Pourquoi si peu d’indulgence envers moi-même ? Pourquoi utiliser la censure comme outils alors que je me suis engagée à briser ce cycle qui enferme les femmes Afro dans un silence douloureux ? Je me rends compte que malgré tout je suis conditionnée, je n’ai que trop bien appris ce que l’on m’a enseigné sur la manière dont une femme de ma communauté doit se comporter.
Manque de motivation ou surproductivité, pour ma personne les deux situations sont révélatrices d’un mal qui me tient par la gorge et je sais que je ne suis pas la seule à ressentir cela, raison qui me pousse à aider celles qui vivent la même chose à garder la tête hors de l’eau.

En quête de guérison, distraire mon esprit est ma seule solution.
Récemment, j’ai mis la main sur un traitement que je n’avais encore jamais tester auparavant, la lecture à voix haute ! C’est en lisant oralement le dernier livre de Ananda Devi « Fardo » paru en octobre dernier, que j’ai découvert que la récitation orale pouvait être stimulante et thérapeutique. Lire à haute voix me permet de me transporter dans le récit, avoir l’impression d’être dans la peau d’une autre mais, au-delà de ça, la lecture sonore s’est montrée très efficace pour museler mes pensées morbides et ténébreuses.
Insérée à ma routine, l’écriture bienveillante m’aide à atténuer mes angoisses. Dans un petit carnet rose acheté chez primark à 1,50€, j’ai pris l’habitude d’inscrire chaque matin des affirmations positives à mon sujet. Sur des pages encore vierges, je dresse une liste d’éloges glorieux, même les exagérations que je ne pense pas vraiment parce que je crois fermement que la parole est créatrice et que tout ce que je dis à mon sujet aujourd’hui a le pouvoir de devenir ce que je serai dans le futur. Et dans un sens, j’y trouve une motivation.
Même si je n’en ressens pas toujours l’envie, je me force à aller marcher. Avec mon masque, mon attestation et mon portable en accessoire, je me balade pendant 1 heure tous les jours. Une longue marche sans but précis où retentissent dans mes oreilles les vibrations de mes chansons préférées qui m’aident à m’évader.

Mes activités citées seront sûrement utiles à beaucoup comme elles pourraient aussi être inefficaces à d’autres. L’objectif n’est pas que vous reproduisiez tout ce que je fais au pied de la lettre, mais que vous soyez capables de parler de ce qui vous hante et que vous trouviez les distractions adéquates pour vous changer les idées. Il se peut aussi que vous ayez des ami-e-s impatient-e-s qui vous feront constamment des reproches par rapport à votre état, évitez de leur faire part de votre ressenti, leurs commentaires peuvent avoir un effet dévastateur sur votre personne ! Consultez le répertoire de professionnel-le-s de la santé (clique)qui, eux, pourront vous donner une liste totalement personnalisée de chose à faire, à changer ou à répéter.
Vous avez le droit d’être malheureuse, la vie n’est pas faite que de joies et de moments festifs. Etouffer ou censurer son mal-être est la pire des chose à faire. Nous, femmes Africaines et Afro-descendantes, devons nous autoriser à ressentir chacune de nos émotions car ce n’est que par cette voie que nous parviendrons à être parfaitement à l’aise avec notre individualité.
Nous ne figurons pas sur cette terre pour endosser des rôles héroïques se dressant pour défendre toutes les populations du monde, alors faites vous plaisir, pensez à vous et à votre bien-être. Ne vous imaginez pas maudites ou différentes parce que ce n’est pas ce que vous êtes. Vous êtes des femmes brillantes, renversantes, talentueuses, fabuleuses et indestructibles. Oui, vous êtes indestructibles, ce n’est pas parce que vous connaissez de mauvais jours, de mauvais mois, ou de mauvaises années que cela signifie que c’est la fin de votre personne. Indestructible ne veut pas dire invulnérable, tout comme la vulnérabilité n’est pas forcément synonyme de faiblesse. La vie est un éternel recommencement et il n’est jamais trop tard pour se laisser le temps de naître à nouveau.
Amour sur vous les Marrons

Vous devez être connecté pour poster un commentaire.