USA : Révocation du droit à l’avortement, le patriarcat et le capitalisme main dans la main pour asservir les femmes

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Ce vendredi 24 juin, les neuf magistrat-e-s de la Cour suprême des Etats-Unis (SCOTUS) ont révoqué l’arrêt “Roe vs Wade”, en vigueur depuis 1973, désignant le droit à l’avortement comme étant un droit constitutionnel. Cette révocation donne la liberté, aux différents États d’Amérique, de prohiber l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Le Missouri étant le premier État d’Amérique à interdire officiellement l’avortement, l’IVG pourra y être passible d’une peine d’emprisonnement.

Selon une étude menée par Joint economic committee democrat (JECDEMS), aux États-Unis, depuis 1973 l’accès à l’avortement légal a permis une hausse 72% de la possibilité pour les femmes d’obtenir un diplôme universitaire, l’étude démontre que cet effet est d’autant plus remarquable  pour les femmes noires dont les chances de finir leur cursus universitaire se sont vues tripler grâce à l’IVG.  Le droit à l’avortement a favorisé  l’augmentation de 11% des avoirs bancaires des femmes et a permis la diminution de 0,54% de la précarité infantile. JECDEMS affirme que les femmes qui, pour cause de délai légal dépassé, n’ont pu avoir recours à l’IVG sont plus susceptibles de se retrouver face à des problèmes financiers par rapport aux femmes qui ont pu avoir recours à l’avortement à temps. Les chercheurs remarquent que les faillites ainsi que les expulsions de domiciles ont augmentées de 81% pour les femmes qui n’ont pu avoir accès à l’avortement pour cause de délai légal dépassé.

En ce sens, il devient évident que la révocation du droit à l’avortement a pour unique mission de favoriser le système capitaliste des états-Unis qui demeure un système misogyne et sexiste. Depuis toujours, le capitalisme  (système inégalitaire qui exploite les classes populaires pour multiplier les richesses des élites et étouffer économiquement les personnes non-privilégiées afin que celles-ci participent indéfiniment à l’enrichissement des personnes argentées) s’allie au patriarcat afin d’octroyer une position subalterne aux femmes et empêcher l’émancipation intellectuelle et financière que l’avortement renforce. 

Le déficit démographique a-t-il influencé cette décision ?

Selon The Population Reference Bureau (PRB), le taux de fécondité dans les années 1960 était de 3,65 enfants par femme. À partir de 1973, suite à l’introduction du droit à l’avortement, et à l’usage massif des moyens de contraception, ce taux s’est vu chuter considérablement et les Américaines sont passées de 3,65 enfants à 1,88 enfants par femme. En constante chute libre, en 2020, les Américaines présentaient un taux de 1,64 enfants par femme. Si la fertilité des femmes blanches est en discontinuité perpétuelle, les États-Unis ne peuvent espérer compter sur la fertilité des femmes racisées pour remédier à ce “problème”, car, depuis 1990, le taux de natalité des femmes non-blanches s’est également vu décroître (1,51 enfants par femme Asiatique, 1,78 enfants par femme Afro-Américaine, et 1,94 enfants par femme Latina).

Le déficit démographique engendre la diminution des personnes professionnellement actives et la présence surabondante de personnes retraitées. Or, la première puissance mondiale a pour obligation d’amasser les vies humaines dans le but de pourvoir aux mécanismes capitalistes dont elle est dépositaire. Il a été prouvé que pour soutenir la croissance démographique, le taux de fécondité devrait être de 2,1 enfants par femme. En sachant cela, il est légitime de se demander si la révocation du droit à l’avortement n’est pas le nouvel outil stratégique censé rebooster le taux de fécondité des Américaines dans une société qui ne perçoit les femmes uniquement sous l’aspect des corps-objets systématiquement voués à générer de nouveaux-elles travailleur-se-s…

Répercussions de l’illégalité de l’avortement

Partout dans le monde, des femmes ont lutté et luttent encore pour le droit à l’avortement qui se redéfinit également par le droit à disposer de son corps, le droit à l’accès aux soins de santé, le droit à l’intégrité de la personne, mais aussi par le droit à l’éducation qu’une grossesse non-désirée est en mesure d’éradiquer. 

Malheureusement nombreux sont les pays qui continuent de condamner l’avortement. L’avortement reste strictement interdit dans des pays comme Andorre, Vatican, Malte, Madagascar, Congo Brazzaville, Djibouti, Philippines, Laos, Egypte, Guinée-Bissau, Sénégal, République Démocratique du Congo, et Brésil. Dans d’autres pays comme le Bangladesh, Birmanie, Sri Lanka, Irak, Liban, Syrie, Afghanistan, Arabie Saoudite, et Yémen l’IVG est autorisée uniquement si la vie de la mère est menacée. En Pologne, l’avortement est interdit sauf en cas de viol et d’inceste, ou si la vie de la mère est en danger.

À cause de l’illégalité de l’avortement, les femmes auront recours à des empoisonnements, à des pratiques douloureuses, et/ou à des avortements opérés dans la clandestinité par des personnes sans formation médicale. La clandestinité des pratiques abortives entraînera des dangers incommensurables pouvant provoquer des décès précipités.

Bafouer les droits des femmes pour ensuite détruire l’intégrité de tous-tes

Le vendredi 24 juin, après la révocation du droit à l’avortement, le juge assesseur conservateur Clarence Thomas originaire du Missouri, connu pour avoir agressé sexuellement l’avocate Anita Hill en 1982, a suggéré une reconsidération des lois liées à la contraception, mais également, des lois concernant les relations et le mariage LGBTQI+. Les réflexions de Clarence Thomas ne sont pas à prendre à la légère. Thomas est un homme très influent qui siège à la Cour Suprême des États-Unis depuis 1991 grâce à ses affinités avec l’ex-Président Américain, Georges W. Bush. 

Clarence Thomas, le seul homme noir de la SCOTUS, est connu pour être le plus conservateur des juges. Il a toujours manifesté librement ses réflexions anti-avortement, tout en étant favorable à la peine de mort. En conséquence de son positionnement misogyne et des réflexions négrophobes qu’il a prononcé pour interdire la discrimination positive, la National organization for women ainsi que bon nombre d’organisations afro-américaines telle que la NAACP se sont formellement opposées à sa nomination à la Cour Suprême en 1991, en vain… 

Bush n’est pas le seul président avec qui Thomas entretient de bonnes relations, puisque en 1991, lorsque il a été accusé par l’avocate noire Anita Hill de faits d’agressions sexuelles remontant à 1982, Joe Biden (à l’époque sénateur)  n’a pas manqué de le couvrir en utilisant comme arme de défense la culture du viol qui dépeint les survivantes comme des être viles et malhonnêtes, et ce, dans toute la presse américaine. En 2021, Joe Biden présente des excuses publiques à Anita Hill, sans pour autant admettre la culpabilité du juge assesseur conservateur Clarence Thomas, qui occupe toujours ses fonctions.

Malgré la multiplicité des preuves attestant la véracité du témoignage de Anita Hill, Clarence Thomas ne fut pas condamné. Néanmoins, l’ex-Président George W. Bush, grâce à Anita Hill, a abandonné son opposition au projet de loi qui vise à dédommager financièrement les victimes de harcèlement sexuel, la loi a été adoptée par le Congrès en 1991.

Ntumba Matunga

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