- Ntumba Matunga
- janvier 6, 2021
- 4 min de lecture
Si les hommes portaient plus d’attention à ce que les féministes dénoncent, ils se rendraient compte que celles-ci pourraient les libérer de ce prisme qui les oppresse presque tout autant. Mais la misogynie est tellement ancrée dans la société qu’il est préférable de cataloguer une femme qui dénonce des méfaits étatiques ou sociaux de femme « dégénérée », « hystérique », ou encore « misandre extrémiste ». Vous trouverez dans cet article certaines des actions menées par les Afroféministes qui s’avèrent être également avantageuses pour les hommes Africains et Afrodescendants.
1. L’égalité des droits
En 2021, on peut encore constater que même dans les pays dits « développés », il réside un écart entre hommes, femmes et personnes non-binaires, qui favorise les hommes au point de vue social, professionnel et même juridique. Ce que bon nombre semble ignorer c’est que l’insertion et l’acceptation de ces inégalités ont propagé des constructions sociales dans les mentalités qui ont pour but de banaliser le manque de parité afin de placer l’homme à une position supérieure.
Ces constructions sociales reposent principalement sur l’idée qui veut que les femmes soient attachées à l’hypergamie, éternellement dépendantes des hommes sur l’aspect financier comme sur bien d’autres aspects. Or, on observe quotidiennement, notamment grâce aux réseaux sociaux, que les hommes s’opposent aux relations interchangeables, à l’amour intéressé, à la galanterie excessive, et à tous les dérivés du marchandage binaire que le patriarcat a créé. Alors pourquoi ne pas laisser la parole aux féministes qui se manifestent contre ces inégalités?
2. Les stéréotypes de genres
Lorsque l’on parle de stéréotype de genres, on pointe encore les injonctions au patriarcat intégrées par les foules qui laissent entendre que les femmes sont comme ci et les hommes sont comme cela (exemple : le rose va pour les filles et le bleu pour les garçons, les filles ne s’intéressent qu’à l’amour et la beauté tandis que les garçons aiment la violence et le pouvoir, les hommes ne pleurent pas, etc), choses qui ont donnée vie à la masculinité toxique que l’on pourrait appeler la persuasion de virilité !
En effet, de peur d’être insulté ou « émasculer », les hommes tentent quotidiennement de prouver leur virilité en montrant qu’ils n’aiment que les activités certifiées masculines parce que les vrais hommes ne regardent pas Desperate housewives et ne se lavent pas les cheveux… Les femmes ayant intériorisé la misogynie s’avanceront dans la même direction lorsqu’elles verront un homme cis-hétéro parler d’un sujet non-certifié masculin, elles l’accableront de remarques du genre :
«Comportement de pétasse ! »
« Fais ton sexe ! »
« T’as oublié ton string ma belle ! »
Ces femmes n’en n’ont sûrement pas conscience mais ces remarques sont plus méprisantes pour les femmes qu’elles ne le sont pour les hommes puisque cela revient à positionner l’homme au-dessus de la femme et à sous-entendre que celui qui s’adonne à des activités dites « de femmes » se ridiculise… Il n’existe pas d’activités genrées. Femmes, hommes et personnes non-binaires peuvent s’occuper ou se distraire de la même façon, il n’y a aucun mal à cela.
3. L’individualisme

L’Afroféminisme se fait également entendre sur la problématique de massification qui concerne majoritairement les Africain-e-s et Afrodescendant-e-s mais aussi les autres racisé-e-s. Ce concept est pratiquement le même que celui qui définit une personne selon son genre, excepté que dans ce cas précis la blanchité est présentée comme perfection normative et rend marginal tout ce qui s’y oppose. Dans les sociétés Occidentales lorsqu’un homme blanc commet un crime, son individualité ne sera pas effacée, on expliquera son parcours personnel en y ajoutant des troubles psychologiques mais son comportement ne sera en aucun cas exposé comme étant représentatif de celui de tous les autres hommes blancs, alors qu’un homme noir partisan du banditisme sera automatiquement utilisé comme outil pour stigmatiser toutes les personnes ayant la même couleur de peau. Une massification volontaire qui n’est rien d’autre qu’un justificatif pour légitimer la négrophobie systémique.
Cette massification raciste se retrouve également chez les personnes noires ayant intériorisé la négrophobie. Celles-ci ne manquent jamais à l’appel quand il s’agit de mépriser leurs semblables ou de déprécier la valeur des habitants du pays d’à côté. Cette xénophobie noire incendie toute une population pour cause du comportement farfelu d’un nombre infime de personnes (exemple : Les noir-e-s sont des paresseux-ses, les noir-e-s ne se soutiennent pas entre eux, les Congolais-e-s sont comme ci, les Antillais comme ça, les Maliens font ceci, les Camers font cela, etc).
4. Appropriation culturelle et invisibilisation

Les Afrofem se montrent très vocales pour ce qui concerne l’appropriation culturelle et l’invisibilisation dans l’espace médiatique, elles sont d’ailleurs souvent moquées par des hommes noirs qui de leur côté n’ont pas l’air de voir l’ampleur que prend la gentrification des espaces noirs. Actuellement on peut constater que la majorité des médias ou pages instagram qui se focalisent majoritairement sur le hip-hop, le rap et ses variantes sont dirigées exclusivement par des personnes blanches qui ont rebaptisé ce que les noir-e-s et les Maghrébin-e-s ont apporté (en France) en appelant cela « musique urbaine ».
Récemment, un youtubeur, jeune collégien de 12 ans, improvisé critique de rap s’est vu adulé, félicité et invité sur les plateaux tv pour le simple fait qu’il donne son opinion sur des morceaux de rap de manière très passionnée. Ce petit garçon est blanc et c’est ce qui fait que nombreux sont ceux qui l’ont trouvé attachant, drôle ou encore fantastique. Un garçon noir de 12 ans n’aurait jamais reçu le même accueil, premièrement parce que les petits noirs de 12 ans ne sont pas considérés comme des enfants (il suffit d’observer le comportement des policiers lorsqu’ils se trouvent face à des filles et garçons noirs pour le constater), et ensuite il aurait été jugé vulgaire, mal élevé et délinquant destiné à mal finir.
Même dans les milieux où ils sont les meilleurs, les noirs n’ont pas droit à la parole, les artistes noirs ne sont intéressants que lorsqu’ils signent dans des labels où les personnes qui toucheront le plus gros pourcentage sur leur musique sont blanches (majoritairement les artistes ne touchent que 4 à 10% des ventes de leur projet).
5. #MenAreTrash
Men are trash est un slogan qui englobe la majorité des oppressions systémiques opérées par les hommes ainsi que les violences et agressions sexuelles toujours exécutés par ces derniers. Quotidiennement, des hommes tentent de décrédibiliser ce mouvement avec le moyen de leur simple existence. Ils se dénomment représentant de toute la gente masculine et déterminent que parce qu’ils (individuellement) n’ont jamais posé le petit doigt sur une femme, les plaintes de celles-ci devraient être classées au rang de cas exceptionnellement rare. Or, on le sait, il y a des hommes qui ont, dans leur enfance, été victime de viol par un autre homme ou par une femme, certains ont grandi en voyant leur mère se faire battre sans qu’ils ne puissent rien faire.
Men are trash devrait être le tremplin qui permettrait à tous les hommes sans antécédents de se désolidariser de tous les déchets qui nous entourent pour que l’on puisse instaurer une paix constante pour tout le monde.
6. Sensibilisation à la santé mentale
Dans une suite logique, après la dénonciation vient la guérison. De par notre Africanité, nous sommes majoritairement condamnées au silence, mais ajoutons à cela la masculinité toxique qui interdit toute forme de tristesse pour les hommes dans le but de ne pas ébranler leur virilité.
Les Afrofem mettent alors le point sur l’importance du bon entretien de la santé mentale et des consultations données par des professionnnel-le-s pour nous affranchir de nos maux gardés en nous, mais également sur le privilège de pouvoir s’offrir ces consultations onéreuses qui ne sont malheureusement pas accessibles à tout le monde.
Des organismes proposent à moindre coût les services de professionnel-le-s mais iels ne sont pas toujours disposés à comprendre les cultures et traditions que leurs patient-e-s noir-e-s exposent, c’est pourquoi les Afrofem militent pour que les professionnel-le-s noir-e-s de la santé mentale aient une meilleure visibilité afin que les Africain-e-s et Afrodescendant-e-s touché-e-s par des traumatismes ou troubles mentaux puissent les trouver plus facilement (liste de professionnel-le-s de la santé).
Récemment le collectif de psy noir-e-s a mis en place une permanence d’écoute gratuite que vous pouvez appeler tous les samedis de 12h à 14h au 08 05 38 59 97.
7. Le combat contre la négrophilie

Aujourd’hui encore, certains hommes noirs ne voient aucun mal à être sexualisé, très souvent on peut les voir se mettre en scène et louer les mérites de leur légendaire maxi-pénis sans savoir que ce mythe est un rescapé de l’époque esclavagiste et que celui-ci avait été raconté pour effrayer les femmes blanches pour que celles-ci ne s’aventurent pas dans les draps d’un noir. Mais l’amour de l’interdit incita plus d’une à sauter le cap et toutes entretinrent cette légende pour conserver les hommes Afro à leur statut de bête sauvage.
Il en va de même pour les femmes noires qui sont également sexualisées, animalisées et fétichisées par les hommes non-noirs. La négrophilie ne dissimule rien d’autre que la négrophobie.
L’amour mixte existe, mais si votre chéri-e non-noir n’a exclusivement que des noir-e-s comme ex-partenaires, posez-vous les bonnes questions…
8. La dénonciation du colorisme

Le colorisme est un concept discriminant qui classifie les personnes noires sur une échelle de désirabilité en fonction de leur couleur de peau, le travail de déconstruction de celui-ci a été apporté sur la table grâce aux Afrofem. Le colorisme n’est pas genré, il touche les hommes également mais ce sont les Afrofem, qui sont les premières à avoir répandue une sensibilisation sur le sujet et ce sont encore elles qui œuvrent quotidiennement pour l’acceptation de notre Africanité, de nos cheveux, ainsi que de nos traits de visage.
En sachant cela, on ne peut qu’admettre que le combat des Afroféministes s’étend sur de larges horizons et qu’il n’est en rien limité. Il est aussi important de faire comprendre que ce n’est pas parce qu’une personne est femme qu’elle sera forcément féministe. Il existe des femmes conservatrices, misogynes, et anti-féministes qui s’entendent à faire les éloges du patriarcat. Toutes les femmes sont différentes et bien que la sororité soit le facteur emblématique du féminisme, on ne peut contester la disparité qui demeure entre les féministes également, et c’est très bien parce que, oppression à part, il faut de tout pour faire un monde !

Vous devez être connecté pour poster un commentaire.